Les extraits et leurs traductions

Selected passages:
CCLXXXVII
Quant Tierris ad vencue sa bataille
Venuz i est li emperere Carles,
Ensemb l’od lui de ses baruns quarante,
Naimes li dux, Oger de Danemarche,
Geifrei d’Anjou e Willalme de Blaive.
Li reis ad pris Tierri entre sa brace,
Tert lui le vis od ses granz pels de martre,
Celes met jus, puis li afublent altres;
Mult suavet le chevaler desarment.
[Munter l’unt] fait en une mule d’Arabe;
Repairet s’en a joie e a barnage;
Vienent ad Ais, descendent en la place.
Des ore cumencet l’ocisiun des altres.

CCLXXXVIII
Carles apelet ses cuntes e ses dux:
«Que me loez de cels qu’ai retenuz?
Pur Guenelun erent a plait venuz,
Pur Pinabel en ostage renduz.»
Respundent Franc: «Ja mar en vivrat uns!»
Li reis cumandet un soen veier, Basbrun:
«Va, sis pent tuz a l’arbre de mal fust!
Par ceste barbe dunt li peil sunt canuz,
Se uns escapet, morz ies e cunfunduz.»
Cil li respunt: «Qu’en fereie jo e el?»
Od .C. serjanz par force les cunduit.
.XXX. en i ad d’icels ki sunt pendut.
Ki hume traïst, sei ocit e altroi. AOI.

CCLXXXIX
Puis sunt turnet Bavier e Aleman
E Peitevin e Bretun e Norman.
Sor tuit li altre l’unt otriet li Franc
Que Guenes moerget par merveillus ahan.
Quatre destrers funt amener avant,
Puis si li lient e les piez e les mains.
Li cheval sunt orgoillus e curant;
Quatre serjanz les acoeillent devant,
Devers un’ewe ki est en mi un camp.
Guenes est turnet a perdiciun grant;
Trestuit si nerf mult li sunt estendant
E tuit li membre de sun cors derumpant:
Sur l’erbe verte en espant li cler sanc.
Guenes est mort cume fel recreant.
Hom ki traïst altre, nen est dreiz qu’il s’en vant.

CCXC
Quant li empereres ad faite sa venjance,
Sin apelat ses evesques de France,
Cels de Baviere e icels d’Alemaigne:
«En ma maisun ad une caitive franche.
Tant ad oït e sermuns e essamples,
Creire voelt Deu, chrestientet demandet.
Baptizez la, pur quei Deus en ait l’anme.»
Cil li respundent: «Or seit faite par marrenes:
Asez cruiz e linees dames…»
As bainz ad Aís mult sunt granz les ci…
La baptizent la reïne d’Espaigne:
Truvee li unt le num de Juliane.
Chrestiene est par veire conoisance.

CCXCI
Quant l’emperere ad faite sa justise
E esclargiez est la sue grant ire,
En Bramidonie ad chrestientet mise,
Passet li jurz, la nuit est aserie.
Culcez s’est li reis en sa cambre voltice.
Seint Gabriel de part Deu li vint dire:
«Carles, sumun les oz de tun emperie!
Par force iras en la tere de Bire,
Reis Vivien si succuras en Imphe,
A la citet que paien unt asise:
Li chrestien te recleiment e crient.»
Li emperere n’i volsist aler mie:
«Deus,» dist li reis, «si penuse est ma vie!»
Pluret des oilz, sa barbe blanche tiret.
Ci falt la geste que Turoldus declinet.

Modern version

CHATIMENT DE GANELON
G. CCCXVII (Vers 3934-3946)
Dès que Tierri sort du combat vainqueur, l’empereur
Charles vient à lui, accompagné de quatre de ses barons :
le duc Naimes, Ogier de Danemark, Geoffroi d’Anjou
et Guillaume de Blaye.^ Le roi prend Tierri dans ses
bras, lui essuie le visage avec ses grandes fourrures de
martre qu’il enlève ensuite et en revêt d’autres. Tout
doucement on désarme le chevalier ; puis on le fait mon-
ter sur une mule arabe. C’est ainsi que le baron tout
joyeux s’en revient. On rentre à Aix et l’on descend
sur la place. C’est alors que le supplice de Ganelon
et de ses parents commence.

G. CCCXVIII (Vers 3947-3959)
Charles fait venir ses comtes et ses ducs : « Que me con-
seillez-vous au sujet des otages que j’ai gardés ? Ils sont
venus au procès pour Ganelon et ils se sont livrés en
otages pour Pinabel.» «Qu’il meurent tous,» répondent
les Français. Alors le roi appelle Basbrun, l’exécuteur
de sa haute justice: «Va,» lui dit-il, «pends-les tous à
cet arbre maudit ; et par cette barbe aux poils blancs,
s’il en échappe un seul, tu es iport, tu es perdu.» «Soyez
tranquille,» répond Basbrun ; « pourquoi ferais-je autre que
mon devoir ?» Puis, avec cent sergents, il les entraîne.
Trente ils étaient qui furent tous pendus. Ainsi homme
qui trahit amène sa propre perte et celle d’autrui.

Aoi.

G. CCCXIX (Vers 3960-3924)
Là-dessus Bavarois, Allemands, Bretons, Poitevins et
Normands de retour, tous sont d’accord, et surtout les
Français, que Ganelon meure d’un supplice extraordi-
naire.^ On fait donc amener devant lui quatre coursiers
auxquels on lie Ganelon pieds et mains. Les chevaux
sont fringants et emportés. Quatre valets les dirigent
vers une jument au milieu d’un champ. Ganelon subit
un supplice atroce. Tous ses nerfs sont affreusement
tendus et tous ses membres s’arrachent de son corps.
Son sang vermeil s’épand sur l’herbe verte. Ganelon
meurt en traître avéré. Homme qui trahit les autres ne
doit jamais pouvoir s’en vanter.

G. CCCXX (Vers 3975-3987)
Quand l’empereur a ainsi fait vengeance, il s’adresse
aux évêques de France, de Bavière et d’Allemagne: «Il
y a à ma cour une noble captive, qui a entendu tant de
beaux sermons et vu tant de bons exemples, qu’elle veut
croire en Dieu et demande à être chrétienne. Baptisez-la
afin que Dieu ait son âme.» Les évêques lui répondent:
«Qu’elle ait des marraines* choisies parmi les dames
nobles et de haut lignage.» Les bains d’Aix attirent
beaucoup de monde ; c’est là qu’on baptise la reine
d’Espagne en lui donnant le nom de Julienne. C’est par
conviction qu’elle est devenue chrétienne.

G. CCCXXI (Vers 3988-40022)
Quand l’empereur eut fait justice et que sa grande
colère fut apaisée, il fit entrer dans le cœur de Brami-
monde la foi chrétienne. Le jour fini, voici venir la
nuit sombre. Le roi se couche dans sa chambre voûtée.
Mais saint Gabriel vient lui dire de la part de Dieu:
«Charles, rassemble les armées* de ton empire, va à
marches forcées dans la terre de Bire porter secours au
roi Vivien à Imphe,* dans la ville que les païens assiègent,
et oh t’appellent les chrétiens à grands cris.» Mais l’em-
pereur aimerait mieux ne pas y aller. « Dieu,» s’écrie-t-
il, « que ma vie est pénible ! » Et les larmes aux yeux, il
tire sa barbe blanche. Ici s’arrête la geste que Thé-
roulde expose.*

English Translation

As soon as Tierri emerges from the victorious combat, the Emperor
Charles comes to him, accompanied by four of his barons:
the Duke Naimes, Ogier of Denmark, Geoffroi d’Anjou
and Guillaume de Blaye. The king takes Tierri in his
arms, he wipe his face with his big marten furs,
which he then removes and puts on others.
Very slowly, the knight is disarmed;
then he is placed on an Arab mule. This is how the
happy baron comes back. We return to Aix and we go down
to the square. It is then that the torture of Ganelon
and his parents begins.

Charles summons his counts and dukes: “What do you think
of the hostages I have kept? They
came to a trial for Ganelon, and they gave themselves
as hostages to Pinabel. “” Let him all die, “replied the French.
Then the king calls Basbrun, the executor of his high justice:
“Go,” he said to him, “hang them all to this cursed tree; and
by that white-haired beard, if one escapes, you are lost, you are lost.””
Be quiet, “replied Basbrun; “Why should I do other than my duty?”
Then, with a hundred sergeants, he leads them away.
Thirty of them were all hanged.
Thus a betraying man brings his own loss and that of others.

Aoi.

On this subject, Bavarians, Germans, Bretons, Poitevins,
and Normans, all agree, and especially the French,
that Ganelon died of extraordinary torment. Thus four couriers
were brought before him to whom Ganelon was bound.
feet and hands. The horses are frisky and carried away.
Four valets lead them to a mare in the middle of a field.
Ganelon suffers an agonizing torture. All his nerves were terribly
tense and all his limbs are torn from his body. His blood
is spreading on the green grass. Ganelon dies as a proven traitor.
A man who betrays others must never be able to boast about it.

When the emperor has done revenge, he addresses the bishops
of France, Bavaria, and Germany: “There is at my court a noble captive,
who has heard so many beautiful sermons and seen so many good examples,
that she wants to believe in God and asks to be Christian.
Baptize her so that God has his soul. “The bishops answer him:”
May she have godmothers * chosen from the noble and high-ranking ladies.
“The baths of Aix attract a lot of people; it is there that one baptizes the queen
of Spain by giving her the name of Julienne.
It is by conviction that she became a Christian.

When the Emperor had done justice and his great anger was appeased,
he brought into the heart of Brami- monde the Christian faith.
The day is over, here comes the dark night.
The king lies down in his vaulted room. But St. Gabriel
comes to tell him from God: “Charles, gather the armies of your
empire, go on forced marches in the land of Bire to help King
Vivien at Imphe, * in the city which the pagans besiege, and Oh,
you call the Christians loudly. “But the Emperor would rather not go.
“God,” he exclaims, “my life is painful! And with tears in his eyes,
he draws his white beard. Here stops the gesture that Theroulde exposes.

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